Synode pour l’Afrique – II Assemblée Spéciale pour l’Afrique 4 au 25 octobre 2009 – III semaine
III semaine
Au cours du repas qu’il a offert à la fin des travaux du synode aux participants, le Pape a manifesté son intention de nommer le cardinal Peter Kodwo Appiah Turkson (voir Photos), archevêque de Cape Coast au Ghana pour succéder au cardinal Raffaele Renato Martino, à la tête du Conseil pontifical Justice et Paix. C’est sans doute un signe fort qu’à la fin d’un synode consacré à la justice, à la paix, la réconciliation en Afrique, un fils du continent prenne en charge ce Dicastère.
Cette dernière semaine aura été celle des conclusions. On a travaillé plus en carrefours linguistiques et entre rapporteurs pour les différents amendements au Message et aux Propositions qu’en congrégations.
Un message d’espérance
Pour que l’Afrique soit réconciliée, vive en paix et devienne juste, il faut que tous ses fils travaillent courageusement et s’engagent fermement à devenir des artisans de paix, des hommes et femmes réconciliés entre eux, avec eux-mêmes et avec Dieu. C’est l’idée guide du message que les pères synodaux ont adressé à l’Afrique. Vous retrouverez très bientôt sur sourou-onsite.com le texte intégral du message que Mgr Fidèle Agbatchi, archevêque de Parakou au Bénin et membre de la Commission qui l’a rédigé nous présente dans la partie audio de cette semaine.
Des propositions en vue d’une exhortation apostolique
Les pères synodaux ont fait une cinquantaine de propositions à Benoît XVI pour que, s’il le veut et le juge nécessaire, il s’en inspire pour rédiger une exhortation post-synodale à l’adresse de l’Afrique.
D’entrée, cette deuxième Assemblée spéciale du synode des évêques pour l’Afrique est qualifiée de « synode d’une nouvelle pentecôte » qui va dans le juste prolongement de la première qui reste le « synode de l’espérance ».
Dans les propositions, les pères synodaux concentrent les idées émergentes autour desquelles, ils pensent qu’on pourrait bâtir une Afrique plus juste, réconciliée et en paix. C’est surtout ce qu’ils croient et jugent important du point de vue pastoral pour relever le défi de la trilogie : paix, justice et réconciliation qu’on y lit.
Ainsi c’est d’une plus forte cohésion entre toutes les composantes de l’Eglise en Afrique qu’il est question, pour faire face aux défis de la trilogie. La coopération organique entre les églises locales et au sein des structures dont elles se sont dotées comme le Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar (SCEAM) ou la Conférence des Supérieurs majeurs d’Afrique et de Madagascar (COSMAM) doit être renforcée et ce Symposium qui peine à prendre de l’envol doit être mieux soutenu. Dans ce sillage des organes comme le SCEAM devraient exister aussi pour les prêtres, les laïcs et les femmes du continent pour que eux aussi se mettent en réseau continental en vue de renforcer la communion entre eux. Un peuple de Dieu uni entre ses membres est plus à même de mener le “combat” sur le terrain.
Il est question de repartir des sacrements tels que la réconciliation et l’eucharistie (Eucharistie source de communion et de réconciliation n° 45), pour donner le juste contenu spirituel, pastoral et théologique à la justice, à la paix et à la réconciliation.
Chacune des composantes de cette trilogie est ensuite décrite avec les points pastoraux qu’on pourrait prendre en considération pour que « l ‘Eglise en Afrique soit vraiment à son service » et la monnaye dans la réalité quotidienne.
La réconciliation qui occupe les nn° 5 à 13 des propositions part d’une redécouverte du Sacrement de la Réconciliation comme lieu où l’homme vit le fruit de la réconciliation opérée par Dieu avec l’humanité en Jésus. Pour qu’il donne tous ses fruits, ce sacrement pourra être inculturé, prendre en compte ce qui est contenu dans les cultures africaines au niveau de la réconciliation. Les pères synodaux proposent la célébration de journées ou semaines diocésaine, nationale et continentale de la réconciliation ; des journées au cours desquelles en familles, en paroisses, dans les communautés ecclésiales vivantes ou de base, on s’assied pour demander pardon et le recevoir. Dans cet effort le dialogue œcuménique et interreligieux selon « l’esprit d’Assise » est souhaité. La religion traditionnelle africaine devra être mieux étudiée pour une meilleur inculturation (n ° 33).
La justice passe par l’éducation
La justice passe d’abord par l’éducation. C’est pour cela que les pères proposent une divulgation à grande échelle de la doctrine sociale de l’Eglise même auprès de ceux qui ne sont pas chrétiens car ses valeurs sont universelles (n°18). La justice, c’est aussi que les talents africains puissent trouver les bonnes conditions pour rester sur le continent et travailler pour son développement au lieu de s’expatrier (n°16). Le n° 14 du Protocole de Maputo concernant l’avortement est décrié, mais il est proposé que les églises locales offrent des structures aux filles et mères en difficultés pour porter à terme leurs grossesses (n°20).
Les questions liées à l’environnement, à la protection de la nature et à la conservation de l’écosystème sont soulevées et les multinationales qui surexploitent les ressources du continent sont interpellées (n ° 21). Dans ce même ordre d’idée, le n° 29 exige des législations justes pour le traitement des ressources naturelles en vue du bien être des populations autochtones et le développement des pays propriétaires. Le n° 30 parle de la question de la terre ou des terres en Afrique et le n° 31 de la globalisation et de l’aide internationale. L’aide n’arrive pas toujours aux fins escomptées et devra respecter les valeurs humaines. Les églises locales devront aider à cela. Les guerres, conflits et déchirements en Afrique naissent autour des puits des ressources naturelles, s’alimentent du commerce des armes ou l’alimentent (n°23), et à cause du non respect de la diversité ethnique (n°32) provoquant ainsi des réfugiés, des personnes déplacées si non des candidats à l’immigration (n°28).
Les nn° 24 à 26 traitent de la bonne gouvernance, des politiques et des élections. Les pères synodaux souhaitent qu’il y ait des structures adéquates pour la formation à la gestion du bien commun et la présence d’aumôneries auprès des parlements et des gouvernements.
Chaque membre de l’Eglise en Afrique doit cultiver la justice, la paix et la réconciliation
La famille (n°38), les prêtes (n° 39), les séminaristes (n°40), les diacres permanents (n° 41), la vie consacrée (n°42), les catéchistes (n°43) sont tous invités chacun selon sa vocation à étudier, cultiver, aimer et vivre les valeurs de la justice, de la paix et de la réconciliation d’abord avec son prochain immédiat pour pourvoir les traduire dans les réalités quotidiennes. Comme instruments, les pères synodaux indiquent la Parole de Dieu (n°46), la doctrine sociale de l’Eglise (n°18), les sacrements (nn° 5 ; 45) et une meilleure connaissance des cultures africaines (n°33).
Les pères synodaux ont fait des propositions pour que certaines couches qui dans les cultures africaines sont pénalisées soient plus prises en considération et respectées dans leur dignité : la femme en Afrique (n° 47), les jeunes (n° 48), les enfants (n° 49), les personnes porteuses de handicap (50), le Sida (n°51), le paludisme (52). Le synode déplore la situation calamiteuse des prisons en Afrique et invite à un exercice de la justice plus respectueuse de l’homme (n°54). La question des drogues et de l’alcool est abordée, afin qu’on fasse une sensibilisation sur leurs effets négatifs et la violence qu’ils engendrent (n°53).
Une proposition assez originale de ce synode est l’appel pour l’abolition de la peine de mort sur tout le continent (n° 55). Elle est utilisée bien souvent contre les personnes qui n’ont aucune possibilité de se défendre et pour éliminer les adversaires politiques.
Pour réussir cette mission au service de la justice, de la paix et de la réconciliation, l’Eglise en Afrique souhaite utiliser les médias. D’où la formation des hommes des médias, l’éducation à l’utilisation des médias, etc. (n°56).
Justice, paix et réconciliation, c’est aussi l’œuvre de l’art
Dans le cadre du synode, en collaboration avec la Mairie de Rome, des artistes africains tels que le groupe Fifito-Bumbulum de Bissau guinéens, Papa Wemba de la République démocratique du Congo et Bonga de l’Angola ont donné ensemble un concert à l’auditorium Sainte Cécile de Rome avec la participation de quelque deux mille personnes dont beaucoup de pères synodaux. Retrouvez, dans la partie audio, les explications de Filomeno Lopez (Fifito) l’un des organisateurs ainsi que l’interview exclusive que Papa Wemba a accordée à Radio Vatican dans la partie vidéo.
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