Synode pour l’Afrique – II Assemblée Spéciale pour l’Afrique 4 au 25 octobre 2009 – I semaine

I semaine Chronique du Synode


La République démocratique du Congo a retenu l’attention des pères synodaux en cette première semaine. Les violences perpétrées dans l’Est contre une église et l’enlèvement d’un missionnaire et d’un grand séminariste de l’archidiocèse de Bukavu ont contraint l’ordinaire du lieu, Mgr François Xavier Maroy Rusengo à rentrer précipitamment pour être proche de la population. Il a dû payer une rançon de 5 000 dollars aux ravisseurs. Le synode lui a exprimé de diverses manières sa proximité affective et spirituelle.

Les évêques de la RDCongo ont dénoncé le fait que l’on attribue à des raisons ethniques ou tribales les causes des guerres dans leur pays. « Ce n’est qu’un paravent. La diversité ethnique est instrumentalisée pour se donner l’occasion de piller les ressources naturelles », ont-ils clamé. « Tous les conflits se déroulent dans les couloirs économiques et autour des puits miniers » a affirmé l’évêque de Tshumbé et président de la Conférence épiscopale nationale du Congo, Mgr Nicolas Ndjomo Lola. Si l’on veut que le pays sorte du cercle infernal de la violence, la communauté internationale ne doit plus « se limiter à soigner les conséquences des guerres », elle doit « s’attaquer avec détermination et de manière persuasive à leurs causes ».
Cette première semaine laisse voir que l’Eglise en Afrique a compris que les questions de justice, de paix et de réconciliation concernent avant tout ses structures et ses composantes, en premier lieu les ecclésiastiques et les personnes consacrées. C’est d’une conversion en profondeur qu’il a été question afin de dépasser les barrières claniques et ethniques du dehors que les chrétiens quel que soit leur rang projettent tranquillement dans les structures de l’Eglise. Il faudra se rappeler que l’Eglise est avant tout la famille de tout le monde : races, peuples et langues. Aucune paroisse, aucun diocèse ne doit être créé sur base linguistique, ethnique et tribale, a-t-on suggéré.

Il faut assurer à la femme africaine les espaces nécessaires dans les structures ecclésiales et sociales

Dans cette Eglise-Famille de Dieu, les femmes veulent participer à l’élaboration des décisions et ne veulent plus être seulement celles qui les exécutent, a affirmé avec un ton ferme Soeur Felicia Harry, Supérieure générale des Sœurs de Notre-Dame des Apôtres au Nigéria, avant d’inviter les pères synodaux à un exercice : « avant de vous coucher ce soir, prenez deux minutes et réfléchissez à ce que serait l’Eglise sans la femme ». (Retrouvez son intervention dans la Rubrique : Des témoignages au Synode).
La justice, la paix et la réconciliation ne peuvent être réalisées sans tenir compte de leur contenu dans la culture africaine. Pour qu’elles soient efficaces, elles doivent être vécues dans les sacrements de l’Eucharistie et de la Réconciliation en s’appuyant sur les cultures africaines.
Pour ne pas faillir à son plan dans ces domaines, l’Eglise catholique doit rester en dialogue permanent avec l’Islam et la Religion Traditionnelle Africaine comme c’est le cas en Côte d’Ivoire, au Niger ou encore en Sierra Léone a fait remarquer l’archevêque d’Abuja au Nigéria, Mgr John Olorunfemi Onaiyekan.
Les nouvelles églises, elles aussi invitent l’Eglise catholique en Afrique à une véritable autocritique sur sa façon de tenir compte des traditions africaines dans l’annonce de l’évangile, de le vivre et de le transmettre aux jeunes générations qui sont une cible si facile pour ces mouvements, a fait remarquer en substance le cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour l’Unité des chrétiens.
La famille africaine est soumise à des politiques étrangères contre la vie et contraires aux valeurs africaines qui la soutiennent. La pastorale doit en tenir compte par une formation doctrinale et spirituelle continue des couples. La théorie du genre qui affirme en substance que la masculinité et la féminité sont d’ordre sociologique ou telles parce que voulues par la société a été décriée, car contraire à la mentalité africaine. « L’idéologie du genre déstabilise le sens de la vie conjugale et familiale que l’Afrique a su préserver jusqu’à présent », a affirmé Mgr Robert Sarah, archevêque émérite Conakry et actuellement Secrétaire de la Congrégation pour l’Evangélisation des Peuples au Vatican, invitant l’Eglise en Afrique « à disposer de personnes compétentes pour faire attention au langage que nous impose la théorie du genre et ses stratégies ».

Il urge au Darfour un accord politique partagé par tous.

Dans l’appui apprécié qu’elle apporte déjà à l’éducation des enfants et des jeunes, l’Eglise en Afrique devra veiller à transmettre ces valeurs qui feront des élèves, des chrétiens qui témoignent dans tous les secteurs de la vie publique celui en qui ils croient. Aussi faudra-t-il assurer aux catholiques engagés en politique la formation nécessaire.
La question de l’autofinancement a été aussi abordée pendant cette semaine. Il en va de l’indépendance et du respect des valeurs de l’Eglise dans la réalisation de ses projets.
Cette semaine a vu aussi l’exposé du premier des deux invités spéciaux à ce synode. Il s’agit de M. Adolphe Adada, ministre d’Etat du Congo Brazzaville et Responsable sortant de la Mission des Nations Unies et de l’Union Africaine au Darfour (la Minuad). Le diplomate est venu illustrer aux pères synodaux en présence du Pape, vendredi soir, le conflit au Darfour. Une chose est à retenir : « Les progrès que nous observons sur le terrain, a-t-il affirmé doivent être consolidés par un accord de paix qui doit être inclusif. Il devrait comprendre non seulement les mouvements armés, mais aussi l’ensemble des composantes de la société du Darfour, y compris la société civile, les déplacés, les réfugiés, sans oublier les Arabes qui sont trop souvent assimilés aux “Janjaweeds”. En effet, seul un accord politique accepté et partagé par tous est à même de ramener une paix durable au Darfour », a conclu M. Adada.
Concernant la Somalie, Mgr Giorgio Bertin, évêque de Djibouti et administrateur apostolique de Mogadiscio a plaidé pour que le « consensus international trouvé autour de la mer » (contre la piraterie), se réalise aussi sur le plan politique.
L’Afrique n’est pas nécessairement ce continent que les médias occidentaux aiment décrire comme une zone de non paix, « il y a moins de guerres en Afrique qu’en Asie » où sur les quatre zones de tensions actuelles (Soudan, RDC, Niger et Somalie) que comptent les quarante-huit nations au sud du Sahara, deux persistent à cause d’ingérences étrangères (Soudan et RDCongo), a fait noté le Rapporteur général du synode, le cardinal Peter Appiah Kodwo Turkson. L’archevêque de Cape Coast au Ghana a souligné aussi que « généralement considérée comme occupant le dixième rang de l’économie mondiale, l’Afrique est cependant le deuxième marché émergeant après la Chine » et demeure selon le G8 un « continent d’opportunités ».

 

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